Preuve numérique : validité des courriels, SMS et messages WhatsApp face au recommandé (entre tradition et modernité)
Publié le 28 Mars 2025
Un envoi électronique (courriel, SMS, WhatsApp) est recevable comme mode de preuve dès lors qu’il garantit la lisibilité du contenu, la pérennité du support et l’inaltérabilité de l’information, sauf si la loi impose un mode de notification spécifique, tel qu’un recommandé ou un acte authentique.
L’écrit électronique : un mode de preuve admis sous conditions
L’écrit traditionnel vise à assurer la lisibilité, la stabilité et l’intégrité de l’information qu’il contient : la lisibilité suppose que l’information doit être compréhensible au moyen d’un procédé approprié ; la stabilité signifie que l’écrit doit traduire une volonté définitivement arrêtée et être conservable ; l’intégrité de l’information signifie que le contenu ne doit pas pouvoir être modifié a posteriori, que ce soit par les parties ou par des tiers, volontairement ou involontairement.
L’écrit électronique, tel qu’un courriel, un SMS ou un message WhatsApp, est admis en tant que mode de preuve dès lors qu’il satisfait aux exigences de lisibilité, stabilité et intégrité. Il peut ainsi, dans certains cas, produire les mêmes effets qu’un écrit traditionnel. Toutefois, lorsque la loi impose une forme spécifique (p. ex. : recommandé, acte notarié), un écrit électronique ne pourra être qu’un commencement de preuve par écrit au sens de l’article 8.1, 7°, du Code civil. Dans ce cas, il ne constitue pas une preuve complète, mais peut être utilisé pour établir l’existence d’un fait lorsqu’il est corroboré par d’autres éléments de preuve.
Envoi électronique : admissibilité et force probante
L’envoi électronique n’estadmissible que si la loi ou un accord entre les parties ne l’exclut pas. Lorsque la loi impose une forme spécifique pour l’envoi d’un acte (p. ex. : recommandé, acte notarié), un envoi électronique (courriel, SMS, WhatsApp) ne pourra être considéré que comme un commencement de preuve par écrit au sens de l’article 8.1, 7°, du Code civil. Il sera alors insuffisant à lui seul pour établir la preuve du fait litigieux, mais pourra attester de l’existence d’un fait, à condition d’être corroboré par d’autres éléments de preuve.
En tout état de cause, la force probante de l’envoi électronique dépend de sa capacité à garantir l’intégrité du contenu et à permettre l’identification certaine de son origine (l’expéditeur). De plus, il ne peut avoir de valeur probante que s’il n’est pas contesté ou s’il est accepté par le destinataire, même implicitement.
Illustrations concrètes
- DÉMISSIONNER
En matière de contrat de travail, toute démission doit être notifiée par écrit et envoyée par lettre recommandée ou remise en main propre contre accusé de réception.
Un courriel, un SMS ou un message WhatsApp n’a donc pas de valeur légale suffisante, sauf si l’employeur reconnaît explicitement sa réception et son acceptation.
Il existe toutefois une plateforme permettant l’envoi de recommandés électroniques, mais l’employeur et le travailleur doivent y être inscrits et le contrat de travail doit prévoir cette possibilité.
- METTRE FIN À UN BAIL
Toute résiliation d’un bail doit être notifiée par lettre recommandée, exploit d’huissier ou remise en main propre contre accusé de réception.
Un envoi électronique ne constitue pas un mode de notification valable. Toutefois, si le bailleur accepte expressément la résiliation par ce biais, cet envoi pourra constituer un commencement de preuve par écrit, opposable en justice en cas de litige. - ACCEPTER OU DÉCLINER UNE OFFRE
En matière civile et commerciale, l’acceptation d’une offre est soumise aux principes généraux du droit des contrats et doit exprimer une volonté claire et non équivoque des parties sur les éléments essentiels du contrat (prix et objet).
Un envoi électronique peut valablement matérialiser l’acceptation, sous réserve de garantir l’intégrité du contenu et l’identification de l’expéditeur.
En cas de contestation, un écrit signé demeure recommandé pour éviter toute difficulté probatoire.
CONCLUSION
Les écrits électroniques (courriels, SMS, WhatsApp) sont admis comme mode de preuve, sous réserve qu’ils garantissent la lisibilité, la stabilité et l’intégrité de l’information. Toutefois, lorsque la loi impose une forme spécifique (comme un recommandé), l’envoi électronique ne constitue qu’un commencement de preuve, et doit être corroboré par d’autres éléments pour être probant.
Conseil : avant d’utiliser un envoi électronique pour des notifications importantes, vérifiez si la loi impose un mode spécifique et, en cas de doute, privilégiez un écrit signé ou un recommandé pour assurer la validité juridique.
Oumezzine Bouchelghouma
Avocate au barreau du Brabant wallon
Cabinet d’Avocats VERSIUS