Validité d’une assemblée générale : le syndic doit être attentif !
Publié le 29 Août 2024
Le juge de paix du 2e canton de Liège1 a annulé une décision prise par une assemblée générale pour un motif de fond, mais aussi des motifs de forme auxquels le syndic doit être attentif.
ACP et Airbnb
La problématique de fond portait sur l’interdiction de la mise en location d’un appartement de l’ACP via la plate-forme Airbnb. Cette question est assez courante et la jurisprudence estime qu’une telle activité locative doit être autorisée par le règlement de copropriété au titre d’activité horeca. En l’espèce, le juge annule l’interdiction votée par l’assemblée générale, car celle-ci portait sur « l’interdiction des locations via des plateformes comme Airbnb ». Le juge de paix estime que cette formulation est trop large, car elle interdit aussi la mise en location pour des moyennes ou longues durées, ce qui constitue une atteinte disproportionnée au droit de propriété.
AG et procurations
La décision est également annulée pour un motif de forme. En effet, le Code civil autorise un copropriétaire à se faire représenter lors de l’assemblée générale par le mandataire de son choix. On sait cependant de longue date que ce pouvoir connaît une limite : ce mandataire ne peut pas détenir plus de trois procurations ou, s’il en détient davantage, il ne peut excéder 10 % du total des voix affectés à l’ensemble des lots. En l’espèce, le demandeur en annulation a constaté que l’un des copropriétaires ayant participé à l’assemblée générale représentait huit copropriétaires et excédait ce seuil de 10 %. Le juge de paix annule donc la décision et souligne que « l’irrégularité en cause aurait dû être relevée par le syndic lors de l’assemblée et faire l’objet d’une décision à ce moment-là ». Il déplore également que le syndic ait acté au PV que la disposition légale était respectée, sans avoir procédé à une vérification minutieuse.
Conseil
Il sera donc conseillé au syndic, en début d’assemblée générale, de systématiquement vérifier que tout copropriétaire qui détient plus de trois procurations reste en deçà du seuil de 10 %, au risque d’invalider l’ensemble des décisions prises par l’AG.
Syndic et action en justice
Enfin, ce jugement est aussi intéressant car il rappelle dans quelle mesure le syndic peut représenter l’ACP en justice.
Le Code civil prévoit que l’ACP ne peut agir en justice qu’après avoir été autorisée par l’assemblée générale, sauf exceptions. Parmi celles-ci figurent la récupération des charges ou encore les actions urgentes ou conservatoires, lesquelles doivent toutefois « être ratifiées par l’AG dans les meilleurs délais ». À défaut, l’action de l’ACP doit être déclarée irrecevable.
En l’espèce, l’ACP formulait une demande reconventionnelle à l’égard du demandeur.
Sans examiner le fond de cette demande, le juge de paix la sanctionne pour un autre motif : il constate que cette demande reconventionnelle n’a pas fait l’objet d’une autorisation préalable de l’AG et ne saurait être qualifiée d’urgente ou de conservatoire. En conséquence, le juge de paix juge cette demande irrecevable.
Ici aussi, il nous paraît que le syndic (et le conseil de l’ACP, il est vrai) aurait dû veiller à faire ratifier cette demande en cours de procédure.
Cette décision nous permet aussi de rappeler que cette exigence vaut pour toute demande formulée par une ACP contre une partie dans une cause, que cette demande soit principale, reconventionnelle ou en intervention.
Ce jugement aborde plusieurs sujets : l’interdiction de la location via Airbnb, le nombre de procurations autorisées lors d’une assemblée générale et l’exigence d’une décision d’assemblée générale préalable à l’action en justice d’une ACP. Le syndic doit veiller au respect de ces formes, au risque de voir une décision annulée et, potentiellement, sa responsabilité engagée.
1 13 janvier 2023, RG n° 22A2796.
Article rédigé par Vincent Defraiteur - Avocat au barreau de Bruxelles - Assistant en droit des biens à l’ULB et à l’UCLouvain Saint-Louis
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