La faillite : échec ou rebond ? La récente réforme du droit de l’insolvabilité
Publié le 25 Mars 2024
Bien que la faillite reste perçue comme l’échec d’une activité entrepreneuriale, le législateur belge la considère aussi comme un outil de régulation économique et comme un moyen pour le failli de tourner la page et de continuer sa route. La loi évolue et permet un tel rebond, ainsi que le fait d’obtenir une seconde chance. D’une certaine manière, le courage d’entreprendre et de prendre des risques est ainsi valorisé, même si les choses sont évidemment différentes en cas de fraude ou d’abus du système.
De nombreux secteurs sont touchés par les difficultés et les crises successives que nous avons connues ne sont pas de nature à faciliter les choses.
Entrée en vigueur le 1er septembre 2023, la nouvelle loi sur l’insolvabilité a récemment fait évoluer le droit de la faillite. Nous abordons ci-après les nouveautés les plus marquantes.
La préparation privée d’une faillite
Le débiteur qui estime se trouver en état de faillite peut demander au tribunal de le déclarer en faillite et que, préalablement à la déclaration de faillite, le transfert de tout ou partie de ses actifs et activités soit préparé.
Il est donc possible de préparer sa propre faillite et d’anticiper la manière dont les actifs et les activités seront valorisés. Il est ainsi possible de réaliser une transition en douceur et même de se porter acquéreur de ses propres actifs et activités dans une perspective de continuité.
L’idée est d’organiser les choses et d’obtenir une meilleure valorisation des actifs, ce qui est dans l’intérêt des créanciers. Cela doit également tendre à sauvegarder un maximum d’emplois.
L’alternative de la dissolution judiciaire
Le tribunal, saisi d’un aveu du débiteur ou d’une demande de déclaration de faillite et qui considère, conformément à l’article XX.100 du Code de droit économique, que les conditions de la faillite sont réunies, peut décider de ne pas prononcer la faillite mais bien la dissolution de la société.
L’intérêt est que la procédure est moins lourde.
Le nombre de travailleurs, l’existence d’actifs immobilisés, la situation des comptes courants, etc., sont autant de marqueurs qui peuvent influencer le choix du tribunal sur ce point.
Le tribunal prononçant la dissolution peut, soit ordonner la clôture immédiate de la liquidation, soit désigner un ou plusieurs liquidateurs. Dans ce dernier cas, le tribunal détermine les pouvoirs des liquidateurs et le mode de liquidation.
L’effacement
Dans le régime antérieur, l’effacement devait être demandé dans un délai de trois mois après la faillite.
Par un arrêt du 22 avril 2021, la Cour constitutionnelle a déclaré que ce délai de forclusion était disproportionné en termes de conséquences, pointant notamment la situation des codébiteurs qui ne pourraient pas bénéficier a posteriori de cet effacement si le failli n’en a pas fait la demande dans le délai.
Ce délai a été supprimé. Plus précisément, il n’est plus nécessaire de demander l’effacement pour que celui-ci soit analysé par le tribunal. Le droit à l’effacement est donc réellement automatique et il sera obtenu sans demande préalable, sauf si quelqu’un s’y oppose et démontre l’existence de fautes graves et caractérisées ayant contribué à la faillite.
Les interdictions
La loi permet d’obtenir une deuxième chance mais il ne faut pas abuser du système. Le tribunal peut, s’il est établi qu’une faute grave et caractérisée du failli a contribué à la faillite, interdire à ce failli d’exploiter, personnellement ou par interposition de personne, une entreprise dans le futur.
Si les évolutions les plus importantes en termes législatifs concernent le droit de la réorganisation judiciaire, le droit de la faillite a également connu certaines adaptations.
Une faillite n’est évidemment pas l’objectif d’une activité entrepreneuriale mais cela doit aussi être vu comme la possibilité de repartir ensuite sur de nouvelles bases et de relancer une activité.
Le législateur l’a compris, mais gare aux récidivistes ou aux mauvais gestionnaires !
Article rédigé par Martin Marinx - Avocat et collaborateur didactique à l’Université de Namur
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