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Le gouvernement wallon modifie les règles en matière de permis d’urbanisme concernant la création d’hébergements touristiques dans une construction existante

Publié le 18 Avril 2023

Un arrêté du gouvernement wallon du 8 décembre 2022 modifie le CoDT en imposant des règles plus strictes sur la création d’hébergements touristiques dans une construction existante, qui seront plus souvent soumis à permis d’urbanisme que par le passé.

Répondant au voeu de certaines communes, dont certaines s’inquiétaient de l’absence de régulation des hébergements touristiques1, le gouvernement wallon a adopté un arrêté du 8 décembre 2022 « modifiant le Code du développement territorial en ce qui concerne la création d’hébergements touristiques »2.

1. Des changements d’utilisation auparavant largement exonérés de permis

Le préambule mentionne que la création d’un hébergement touristique dans une construction existante entraîne des nuisances (dont le bruit, la difficulté de stationnement et
l’impact sur la mobilité) et participe à l’augmentation de la pression foncière.

L’arrêté est pris en exécution de l’article D.IV.4, alinéa 1er, 7°, du CoDT, qui, faute d’avoir fait l’objet d’un arrêté d’exécution, n’entraînait pas encore l’obligation de demander un permis pour « la création d’un hébergement touristique dans une construction existante ».

Il en résultait effectivement que, si elle ne s’accompagnait pas d’autres actes ou travaux eux-mêmes soumis à permis, la création d’hébergements touristiques dans une construction existante échappait largement à l’obligation d’obtenir un permis d’urbanisme.

2. Une nouvelle obligation de principe

L’arrêté du 8 décembre 2022 modifie les articles R.IV.1.1 et R.IV.4.1. du CoDT.

Il en résulte que « la mise à disposition à titre onéreux, même à titre occasionnel, d’une ou de plusieurs pièces existantes à titre d’hébergement touristique est une modification de destination de tout ou partie d’un bien », et est par conséquent soumise à permis, étant entendu que « [t]outefois, la mise à disposition de moins de six chambres occupées à titre d’hébergement touristique chez l’habitant n’est pas soumise à permis ».

La mise à disposition même occasionnelle de secondes résidences, notamment par des plates-formes du type Airbnb, est donc clairement visée par la nouvelle obligation.

L’on relèvera également que, si la notion de chambre n’est pas définie expressément, l’arrêté précise qu’elle « peut être composée d’une ou de plusieurs pièces, mais ne peut pas contenir l’ensemble des fonctions de base de l’habitat telles qu’énumérées à l’article D.IV.4., alinéa 2 ».

Ces fonctions de base sont, pour rappel : cuisine, salle de bains ou salle d’eau, WC et chambre.

3. Une circulaire explicative

Une circulaire explicative fouillée du 16 décembre 2022 a été publiée sur le site de la Région3. Elle contient de nombreux exemples et aborde notamment le champ d’application de la nouvelle obligation, son articulation (cumul) avec les obligations relevant du Code wallon du tourisme et des explications (définitions ?) des termes utilisés dans l’arrêté. Le praticien y trouvera également des recommandations à l’attention des communes dans l’application de la nouvelle règle dans le cadre de l’instruction des permis, en fonction du zonage, qui appréhendent des problématiques telles que la surdensité ou la localisation. Enfin, l’on y lit des considérations sur l’exemption de l’obligation de faire appel à un architecte, et même un point sur la question de la charge de la preuve de la légalité (ou non) d’une situation de fait, respectivement en cas de poursuites ou de demande d’un permis d’urbanisme4.

Cette circulaire explicative peut probablement être lue comme une réponse partielle à l’avis du Conseil d’État no 72.394/4 du 21 novembre 2022. Le Conseil d’État y invitait le gouvernement à définir expressément et positivement la « chambre ».

4. Entrée en vigueur et régime transitoire

L’arrêté est entré en vigueur le 30 janvier 2023. Il prévoit cependant un régime transitoire : il s’applique aux hébergements touristiques mis à disposition à titre onéreux « pour la première fois » après le 30 janvier 2023. L'arrêté ne s’applique cependant pas lorsque la mise à disposition à titre onéreux intervient ultérieurement à cette date, mais concerne des hébergements touristiques qui satisfont à deux conditions cumulatives, à savoir i) que la création de l’hébergement touristique a été autorisée par un permis d’urbanisme préalable à l’entrée en vigueur de l’arrêté et ii) qu’il « ressort[e] explicitement du dossier de demande de permis ou du permis d’urbanisme octroyé que les actes et travaux autorisés étaient destinés à créer un hébergement touristique dans une construction existante ».

L’on comprend mieux pourquoi le ministre a tenu à exposer dans la circulaire explicative les règles relatives à la charge de la preuve qui pèsent sur les demandeurs de permis.

L’on ne peut que recommander à ceux qui entendent se prévaloir d’une mise à disposition à titre onéreux avant l’entrée en vigueur de l’arrêté d’en conserver durablement les preuves, sachant en outre que les communes et la Région refusent très souvent de se prononcer sur la légalité d’une situation qui leur est présentée en dehors d’une demande de permis, ce qui peut mettre les propriétaires et exploitants dans des situations délicates du point de vue de la sécurité juridique.

La circulaire précise également que, dans le cadre de l’exonération jusqu’à cinq chambres chez l’« habitant », l’on tient également compte des chambres déjà existantes avant l’entrée en vigueur de l’arrêté.

Article rédigé par Laurent Delmotte
Avocat au barreau de Bruxelles
Ld@resolved.law
www.resolved.law

Article issu du Forum de l'Immobilier n°49 - Mars 2023

1 Th. Céder, « Vers une meilleure régulation des hébergements touristiques en Wallonie », consultable en ligne sur https://www.uvcw.be/ amenagement-territoire/actus/art-7964 (consulté le 21 février 2023).
2 M.B., 20 janvier 2023.
https://lampspw.wallonie.be/dgo4/tinymvc/apps/amenagement/views/documents/juridique/codt/circulaire-permis-hebergementtouristique.pdf (consulté le 21 février 2023).
4 Sur cette question, l’on renvoie à la contribution que nous avons rédigée avec M.-C. Flament dans cette revue, « La création de logement(s) sans permis en Région wallonne et ses conséquences en fonction de la date à laquelle elle s’est réalisée : charge de la preuve et illustrations », 2022, nos 43 et 44, pp. 7-8.

 
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